Le REDOUL ou ROUDOU

Une plante très commune à Lunas... mais très dangereuse.

   Chacun connaît à Lunas « La Roudounière » où, dans les décennies 70 et 80, Mathieu Ciffre accueillait dans son arène les vachettes qui animaient les jeux de la fête locale. Mais quelle est l’origine de l’appellation de ce tènement lunassien ?

   ...La Roudounière désigne tout simplement un lieu où abonde le « roudou »… Quant au roudou (déformation locale de «redoul») c’est une plante méridionale, très commune, envahissante qui s’installe en lisière de bois, sur les bords des chemins et des ruisseaux, principalement sur des sols calcaires ou tout au moins non acides.

La plante…

   C’est un arbuste pouvant atteindre 2 à 3 mètres, aux rameaux grisâtres et de section carrée. Ses feuilles (photo 1) persistantes, allongées, opposées possèdent 3 nervures.
   Les fleurs (photo 2) apparaissent en avril. Elles sont petites, verdâtres avec 5 styles rougeâtres, groupées en grappes dressées aux extrémités des jeunes rameaux. Elles donnent naissance à des fruits (photo 3) à 5 carpelles ressemblant à des baies vertes qui, en mûrissant, noircissent.
   Le puissant drageonnement (*) du redoul l’a parfois fait employer dans les travaux de reboisement des terres fortement érodées du Midi. Ses racines traçantes fixent les pentes privées de protection végétale mais sa toxicité incite à ne pas le multiplier...

Attention cette plante est dangereuse…

   Le roudou (de son vrai nom, corroyère à feuilles de myrte) est une plante toxique. Toutes ses parties le sont, mais principalement les jeunes pousses et les fruits.

   Le roudou contient en effet plusieurs substances très nocives : la coriamyrtine (dont l’action est comparable à celle de la strychnine provoque des convulsions) et un alcaloïde, la coriarine ! Les symptômes liés à ces toxines absorbées accidentellement peuvent ressembler à une intoxication alcoolique d’où le nom espagnol de la corroyère, « emborrachacabras », que l’on peut traduire par « enivre chèvres ». Les premiers troubles apparaissent entre 20 minutes et 2 heures après l’ingestion. Chez les animaux ayant consommé abondamment la plante, on observe une phase d’excitation (course, chutes, crises convulsives) suivie de prostration avant l’évolution vers un coma mortel. L’homme peut être victime indirectement de la toxine en consommant par exemple des escargots ayant mangé du roudou… On la retrouve également dans le lait des chèvres ou des brebis ayant brouté la corroyère. A Barcelone, en 1955, huit enfants de 3 à 9 ans furent intoxiqués. L’enfant de 3 ans mourut. Les fruits ont un goût légèrement acide et non désagréable qui dissimule d’autant mieux les toxines renfermées.

Le roudou, plante des tanneurs…

   Au Moyen Age la plante, très riche en tanins, était recherchée par les tanneurs. Elle faisait l’objet d’un important commerce entre l’Espagne et les ports languedociens. Les tiges broyées étaient disposées dans des cuves avec les peaux. Les matières tannantes ainsi libérées contribuaient à rendre les cuirs imputrescibles. Le nom « corroyère » rappelle cet usage car le corroyage est l’opération de préparation du cuir.

Le roudou, plante tinctoriale…

Les fruits du roudou renferment une substance noire utilisée autrefois comme teinture pour les tissus de laine. Ce colorant entrait également dans la fabrication des encres.


(*) drageon : jeune pousse qui sort du sol à une distance plus ou moins grande du pied mère, assurant la propagation du végétal.…

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